Mariée et maman de deux enfants, Muriel Greuse est chirurgienne plasticienne. Elle partage son activité entre le CHU Brugmann et son cabinet privé.
Muriel Greuse est la fille unique d’un père architecte et d’une mère qui fut harpiste et couturière. Son grand-père, un pharmacien, très intéressé par les dissections anatomiques, marqua la jeune fille. «J’avais entre 11 et 13 ans quand j’ai vu un reportage télé dans lequel apparaissait Madeleine Lejour, un professeur de chirurgie plastique qui travaillait au CHU Brugmann. A partir de ce moment, j’ai aimé cette chirurgie et décidé d’en faire ma profession. D’emblée, j’ai voulu opérer le sein et la main.»
C’est en 1984 qu’elle se lançait dans les études de médecine à l’ULB. En 1991, elle commençait sa spécialisation en chirurgie esthétique. Elle passa ses trois premières années de chirurgie générale au CHU Tivoli de La Louvière et à l’Hôpital civil de Jumet. «En 1994, je suis arrivée au CHU Brugmann où j’ai accompli mes trois dernières années de formation. Durant ces trois années, je suis également allée me former à l’Institut Bordet, à l’Hôpital Erasme et au Parc Léopold. J’ai encore passé six mois en Italie pour y suivre une formation complémentaire en chirurgie mammaire.»
Une préférence pour les seins
En 1998, la spécialiste était engagée à temps plein au CHU Brugmann. Un peu plus tard, elle reprenait, près de La Basilique à Bruxelles, le cabinet d’une chirurgienne plasticienne qui mettait un terme à sa carrière et partait vivre à l'étranger. «J'ai travaillé à temps plein au CHU Brugmann jusqu'en 2002, tout en développant mon activité privée. Depuis 2002, je travaille trois demi-journées par semaine à Brugmann, en tant que consultante et je consacre le reste du temps à mon activité privée.» La chirurgienne a choisi de ne pas faire de privé à Brugmann. Elle y pratique majoritairement de la chirurgie réparatrice abdominale et mammaire, ces interventions étant remboursées par la mutuelle. «Les patients peuvent se faire opérer dans d'excellentes conditions par des personnes qu'ils ont choisies. Les conditions financières étant très intéressantes, la demande est importante. Je pratique aussi des opérations consécutives à des cancers de la peau et quelques reconstructions, mais ce type d’intervention n'est malheureusement pas devenu mon activité principale.» Le Dr Greuse opère également à la Clinique de La Basilique et à l’Institut Edith Cavell. Son activité privée comprend davantage de chirurgie plastique qu’au CHU Brugmann, son domaine de prédilection étant l’opération des seins. «J'aime les seins, je trouve ça beau. J'aime réfléchir, essayer de trouver des solutions, opérer, être en contact avec les tissus. En chirurgie plastique, il faut parfois un peu innover, essayer d'adapter des techniques que l'on connaît, inventer autre chose pour faire des reconstructions. Face à une augmentation mammaire, il faut voir quel type de prothèse utiliser, chaque opération étant différente en fonction de la patiente et de son anatomie. C'est un travail très créatif. Bien sûr, il faut toujours faire comprendre aux gens qu'il ne s'agit pas d'une promesse de résultat parfait, mais qu'on espère obtenir un certain résultat, tout en sachant que nous avons une obligation de résultats en chirurgie plastique. »
Féminisation
En 1992, l’assistante en chirurgie plastique épousait Christian Daniel, devenu décorateur d’intérieur et dont la passion pour la cuisine l’a amené à ouvrir un petit restaurant. Le couple a deux enfants: une fille, Lara, âgée de 15 ans et un fils de 4 ans, Lawrence. «Ma fille est née pendant ma spécialisation. A l’époque, je travaillais à l’Hôpital civil de Jumet. Etant employée, j’ai pris trois mois de congé de maternité. La reprise fut très dure, notamment parce qu’il fallait assumer les gardes le week-end et ne revoir mon bébé que le lundi soir. Par bonheur, mon mari et ma famille étaient très présents, ils ont consacré beaucoup de temps à Lara qui n’est pas allée à la crèche pendant sa première année. Leur aide et leur soutien m’ont permis de poursuivre ma carrière. Lorsque je suis partie me former en Italie pendant six mois, je voyais ma famille une fois par mois. Mon mari s’occupait de notre fille. Ce fut une expérience formidable. Par la suite, mes parents ont gardé mes enfants pour me permettre d’étudier les week-ends. J’avais le statut d’indépendante quand mon fils est né. La grossesse s’est très bien passée, même si j’ai dû réduire mes activités du fait de la fatigue. Au total, je n’ai pris que deux mois de congé de maternité. Ensuite, mon fils a eu une nounou, ce qui était très facile car je ne devais pas me tracasser s’il était malade.»
Son expérience fait dire à Muriel Greuse qu’elle apprécie la féminisation de la profession, tout en estimant que l’exercice de la médecine restera difficile pour les femmes. « La médecine est une profession difficile car certaines disciplines exigent une disponibilité pratiquement 24 heures sur 24. En ce qui me concerne, si un patient me téléphone parce qu'il va mal, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, je dois y aller. C'est donc un peu difficile à gérer par rapport à la vie familiale. D’une manière générale, gérer une vie de famille et une activité professionnelle, sans l’aide et le soutien d’autres personnes, est infaisable pour une femme, surtout quand les enfants sont petits. On peut toujours diminuer son temps de travail, mais il devient alors impossible de gagner convenablement sa vie. Personnellement, il était inconcevable pour moi de réduire mon activité professionnelle. »
Une majorité de patientes
La patientèle du Dr Greuse est constituée de 85% de femmes. Parmi elles, nombreuses sont celles qui demandent une opération des seins et des interventions esthétiques au niveau du visage. «Les meilleures patientes sont celles qui demandent une intervention pour elles-mêmes car, dans ce cas, leur plainte est tout à fait justifiée. Lorsque la demande n'est pas justifiée, mon premier rôle est de dire à la patiente qu'elle est très bien et que l'intervention est inutile. Sur 100 personnes, il y en a 80 que je n'opère pas. Si certaines pathologies mettent le médecin face à la mort, en chirurgie plastique et esthétique, nous ne soignons pas de patients en situation critique. Nous avons toujours affaire à des personnes en bonne santé, qui viennent pour un mieux et à qui nous apportons des choses positives. C'est donc très agréable: vous apportez de la féminité aux patientes avec qui vous avez de très bons contacts et qui vous témoignent une grande reconnaissance. Quand vous voyez que les gens sont heureux, qu’ils vous remercient et vous disent que vous avez fait quelque chose de bien dans leur vie, c'est formidable. »
Muriel Greuse considère le fait d’être une femme comme une richesse dans sa spécialité. «Le contact est différent entre femmes et les patientes s'imaginent que je les comprends mieux parce que je suis une femme. Elles se dévoilent peut-être plus facilement face à une femme que face à un homme. Je pense qu'elles n'ont pas tout à fait tort, même s'il ne faut pas spécialement être une femme pour faire de la chirurgie plastique.»
Très satisfaite de l’orientation donnée à sa carrière professionnelle, la chirurgienne commence seulement à profiter de ce qu’elle a créé. «J’aimerais évidemment avoir un peu plus de loisirs, mais si c’était à refaire, je recommencerais volontiers. Un jour, peut-être, cela me plaira-t-il d’avoir une vue globale sur un domaine que j’ai beaucoup aimé, comme les seins, et pour cela, d’écrire un livre sur les cas que j’ai opérés. »
Auteur : Colette Barbier
Source : Le Journal du Médecin
(n°
1950 du 21/10/2008) - ©Lejournaldumedecin.com