>>Simuler accouchements et naissances avec "Noëlle"

"Noëlle"

Noëlle et ses «bébés» sont à la médecine périnatale ce que le simulateur de vol est à l’aéronautique: un outil pour apprendre à faire face de manière optimale aux situations d’urgence.

En salle d'accouchement, la situation d'urgence typique est une complication où la maman et le bébé sont en danger et doivent être pris en charge rapidement par différents intervenants.
Dans les faits, l'anesthésiste apporte les soins nécessaires à la mère en détresse, en collaboration avec l'obstétricien, qui gère l'accouchement difficile. Dès que le bébé est né, le pédiatre doit prendre le relais le plus vite possible et être prêt à prodiguer les premiers gestes de réanimation si la situation le requiert.

Collaborer pour sauver des vies

«Dans ce genre de situation, l’issue est en grande partie déterminée par une bonne articulation entre les différents protagonistes», explique le Dr Leonardo Gucciardo, Responsable du secteur obstétrique.
«Les risques pour la mère et l’enfant sont de taille», ajoute le Dr Anne-Britt Johansson, Chef de clinique de la Néonatologie intensive. «La séquence des gestes doit être exécutée très rapidement.» Un peu comme une chorégraphie savamment répétée.

Articuler les expertises de chacun peut cependant s’avérer très complexe. Et c’est précisément pour parvenir à une coordination optimale entre l’anesthésiologie, l’obstétrique et la néonatalogie que ces trois spécialités se sont associées et ont «adopté» Noëlle et ses deux bébés.

Mais qui est Noëlle ?

Noëlle est un projet porté conjointement par les Drs Anne- Britt Johansson, Leonardo Gucciardo et le Pr Philippe Van der Linden (Chef de service d’Anesthésiologie). Plus concrètement, Noëlle est aussi un mannequin téléguidé qui permet de simuler une multitude de scénarios d’accouchement. Elle permettra notamment aux jeunes médecins et aux futures sages-femmes de mettre en pratique leurs acquis théoriques.

En plus de la «maman», l’équipe à l’initiative du projet a fait l’acquisition de deux «bébés-simulateurs » (un nouveau-né à terme et un prématuré).
Ces mannequins dits de «haute fidélité» sont extrêmement réalistes: Noëlle peut se mettre à convulser, la cage thoracique des bébés se soulève et s’abaisse au rythme de leur respiration, la tension artérielle des poupées peut chuter dangereusement… Le tout sous le contrôle des médecins instructeurs. «L’état des mannequins se dégrade ou s’améliore en fonction de la séquence des gestes posés par les participants à la formation», explique le Dr Johansson. «À côté des scénarios préprogrammés, nous pouvons aussi adapter les réactions des mannequins "en direct"

Une méthode d'apprentissage inédite

La simulation débute avant même l’entrée en salle d’accouchement. Les participants doivent enfiler masques, gants et blouse. Objectif: être placé en situation. «C’est aussi la raison pour laquelle les scénarios impliquent l’équipe au complet; les situations ne sont pas envisagées de manière fragmentée», précise le Pr Van der Linden. Au cours de la scène proprement dite, trois caméras filment les participants sous des angles différents. Le monitoring des patients est également enregistré.

Après la simulation, place au débriefing en équipe. Le principe est d’analyser méthodiquement la séquence filmée sur trois plans et d’observer les gestes posés en amenant les jeunes médecins à une réflexion sur leurs propres pratiques. «C’est une façon inédite d’appréhender la formation de nos équipes», s’enthousiasme le Dr Gucciardo. «Faire partie de cette aventure qui débute est très excitant», conclut-il.

:: Pas avant l'hiver 2013 :: S’ils sont impatients de commencer à utiliser Noëlle, les Drs Johansson, Gucciardo et Van der Linden devront attendre jusqu’à fin 2013 - début 2014, le temps que l’ensemble de l’équipe soit formé à la manipulation des robots et à la traduction des situations cliniques en scénarios.
:: Les trois atouts de Noëlle ::
>La multidisciplinarité : «Avoir les trois mannequins (la mère et ses deux nouveau-nés) permet de s’entraîner en équipe», souligne le Pr Van der Linden. «Or la littérature a démontré que c’est l’approche multidisciplinaire sous la direction d’un "leader" qui fait la différence dans les situations extrêmes
>Apprendre à travailler en équipe : «Quand on est jeune médecin, il arrive qu’on ne se rende pas compte de ce qu’implique le travail en équipe. Mais en situation d’urgence, la désorganisation et le hasard ne sont pas permis», observe le Dr Johansson. «Ce type de simulation permet d’apprendre à gérer la notion d’équipe et de collaboration dans des situations d’urgence où la responsabilité doit être partagée
>Gérer le stress en toute sécurité : «Ces situations d’urgence sont génératrices de stress», constate le Dr Gucciardo. «Ce qui a été appris en théorie peut alors ne pas être correctement appliqué en pratique.» En reproduisant une situation de stress, la simulation permet d’apprendre à gérer ce paramètre en toute sécurité puisqu’elle n’induit aucun risque pour le patient.

Auteur : Aude Dion
Source : Osiris News (n° 32, septembre-novembre 2013)