Campus Osiris : quand les hôpitaux se mettent au vert
Ces dernières années, des initiatives "ecofriendly" ont fleuri sur le campus Osiris. Leur
point commun? Elles sont portées par des équipes ambitieuses et motivées, soucieuses
de faire des hôpitaux du campus des établissements écoresponsables à la pointe.
Avez-vous la moindre idée de la quantité de déchets
produits dans un hôpital de l’envergure du CHU Brugmann
chaque année? «Si on additionne les chiffres des sites
Horta et Brien, on avoisine les 500 tonnes de déchets
ménagers par an!», indique Paul Thevelin, responsable
du Département Facilitaire du CHU Brugmann. «En ce qui
concerne les déchets spécifiquement médicaux, à savoir
tout ce qui a été en contact avec le patient (bandages,
compresses…), on arrive à 162 tonnes. Le papier/carton
représente quant à lui une centaine de tonnes.»
On le voit,
la gestion des déchets constitue un enjeu de taille pour les établissements hospitaliers.
La règle des « 3R »
«Parmi les initiatives prises dans ce cadre, nous
essayons de sensibiliser l’ensemble du personnel hospitalier à la désormais bien connue règle des "3R" qui
sous-tend tout comportement écoresponsable: "reduce – reuse – recycle"», expliquent Pascal Buyse, responsable
des services Achats et Logistique de l’HUDERF, et
Alexandra Chkolar, en charge du suivi de l’amélioration de
la collecte des déchets. «L’idée est de donner la priorité à la réduction des déchets (reduce) en amont en menant
une réflexion sur ce qu’on va utiliser, de réutiliser (reuse)
quand c’est possible, et enfin de recycler (recycle) tout ce
qui peut l’être. C’est ici qu’intervient le tri des déchets.»
«En tant qu’institution de soins de santé publique, nous
sommes légalement tenus de faire le tri sélectif», signale Paul
Thevelin. Mais tant le CHU Brugmann que l’HUDERF ont à coeur de se profiler à la pointe de la gestion des déchets.
Au CHU Brugmann
On observe un entrain similaire du côté du CHU
Brugmann : «Nous avions proposé de fournir des poubelles "bleues" aux services qui souhaitaient collecter les déchets
PMC. En quelques mois, nous sommes passés de 6 à 70
points de collecte!», se réjouit Paul Thevelin. «Chaque fois que nos fournisseurs nous proposent
de nouvelles méthodes d’évacuation des déchets, nous
essayons de les mettre en oeuvre», poursuit-il. «Un exemple
récent: le recyclage des cartouches d’encre, qui peuvent être ouvertes, vidées et reconditionnées.»
«Le déchet est devenu une richesse», conclut Paul
Thevelin. «C’est évident pour tout ce qui est recyclé et
transformé en matière première (papier, plastique, métal…).
Mais même les déchets non recyclables peuvent être revalorisés,
par exemple en transformant la chaleur générée
lorsqu’ils sont incinérés en une nouvelle source d’énergie.»
:: Un pas de plus vers l'hôpital "paperless" ! :: En l’espace de quelques années, le
Service
de Médecine nucléaire du CHU Brugmann a
drastiquement diminué sa consommation
de papier. «
Auparavant, tous nos examens étaient imprimés», explique le Pr Anne-Sophie Hambye, chef du service.
«
En 2013, nous avons proposé aux médecins
de l’hôpital d’utiliser le PACS, un système
d’archivage informatisé des images
qui permet de les consulter en ligne depuis
l’établissement. Seuls les clichés destinés
aux médecins extérieurs étaient encore
imprimés. Cela nous a permis de diminuer
notre consommation de papier de 80%!»
«
En 2016, nous sommes passés à la dictée
informatique complète des protocoles
d’examen: le texte lu dans le micro est
automatiquement retranscrit sur l’ordinateur.
Cette formule permet un envoi plus
rapide des examens urgents et nous aide à diminuer notre consommation de papier étant donné que les documents ne doivent
plus être imprimés pour vérification par le
médecin.»
«
Parallèlement, nous nous sommes mis à utiliser le tout nouveau portail d’imagerie
médicale du CHU Brugmann. En pratique,
le médecin et le patient reçoivent un code
qui leur donne un accès en ligne à leurs "images", où qu’ils soient. Le protocole
papier, lui, est envoyé aux médecins
externes via un système sécurisé de transfert
des données et/ou par la poste.»
Le résultat de ces dernières mesures? Une
diminution de la consommation de papier
de 90% par rapport à 2013! «
Cela correspond à une diminution des coûts de près de
6.000 euros et c’est un gain indéniable au
niveau environnemental!»
«
Ces initiatives nous placent à la pointe
par rapport aux autres hôpitaux», se félicite
le Pr Hambye. «
Si la majorité des services
disposent aujourd’hui du PACS, le portail
d’imagerie médicale, lui, n’est pas encore
très développé dans le monde hospitalier.»
«Au final, c’est aussi un bel exemple de
collaboration entre les services de Médecine
nucléaire et de
Radiologie», souligne le
Pr Hambye. «
Un projet comme celui du portail
d’imagerie n’aurait pas été mis sur pied
pour le seul Service de Médecine nucléaire.
D’où l’intérêt de collaborer entre services,
tant pour le bien-être du patient que pour la
préservation de l’environnement.»
Economies d'énergie : cap sur l'innovation
![Cogénération](../../images/news/20161201-ecofriend-2.jpg)
Moins visibles mais tout aussi remarquables en termes de préservation
de l’environnement, les mesures liées à une consommation maîtrisée de
l’énergie peuvent faire la différence à l’échelle d’un hôpital. Parmi les
dernières initiatives en date: l’installation, fin 2016, d’une toute nouvelle
cogénération sur le site Horta.
«Cette cogénération nous permet de produire de
l’électricité et de la chaleur de manière simultanée»,
explique Laurence Caussin, gestionnaire Énergie du
CHU Brugmann. «Sa mise en oeuvre s’inscrit dans le
cadre d’un projet global de rénovation de toute l’installation
de chauffage du site Horta.»
Le principe de la cogénération
Concrètement, l’installation de Horta fonctionne
avec un imposant moteur de 5 m de long alimenté au
gaz. Ce moteur sert à faire tourner un alternateur et à produire de l’électricité qui est utilisée à l’hôpital.
Mais ce n’est pas tout: le circuit de refroidissement
du dispositif est raccordé au réseau de chaleur de l’établissement, ce qui permet de chauffer les locaux
grâce à la chaleur dégagée par le moteur. «La
cogénération nous permet d’obtenir un rendement
supérieur à ce que nous pourrions avoir avec une
centrale électrique classique et une chaudière installées
de manière distincte», indique Laurence Caussin.
Des économies substantielles
«L’économie d’énergie est de l’ordre de 20%, ce
qui équivaut à une diminution de 7.000 tonnes de CO2
sur un an dans notre cas!», précise Éric Renière,
Directeur Technique du groupement Osiris.
«L’installation de la cogénération nous a en outre
permis de toucher des "certificats verts", mécanisme
grâce auquel nous percevons des rentrées financières
non négligeables. Si on prend en compte les économies d’énergie réalisées et l’argent reçu suite à la revente des certificats verts, on arrive à un gain
total annuel de 1 million d’euros grâce à la cogénération.
Bien que peu visible pour les membres du
personnel, ce projet ambitieux a donc un impact considérable
pour l’hôpital!»
À Brien aussi
L’hôpital Paul Brien s’est
associé au SIAMU, au
CPAS de Schaerbeek et à la Maison du Travail
pour installer une
chaufferie aux pellets
et une cogénération
fonctionnant à l’huile
de colza. «Il s’agit de
l’une des plus grosses
cogénérations de ce type
en Belgique», précise
Laurence Caussin.
:: Utilisation rationnelle de l'énergie : l'affaire de tous ! :: Pour parvenir à des résultats optimaux, la gestionnaire énergie travaille en étroite collaboration avec d’autres services comme les Travaux, les Achats
ou encore les Cuisines. «Mais même si le gros du travail se fait dans l’ombre, chaque membre du personnel peut agir à son niveau!», affirme Laurence
Caussin. «Penser à éteindre les appareils qui ne sont pas utilisés, ne pas laisser la lumière allumée, fermer les portes et fenêtres pour éviter les déperditions
d’énergie, diminuer les vannes thermostatiques le soir… sont autant de petits gestes qui, mis bout à bout, peuvent avoir un réel impact. Autre
attitude "eco-friendly": prévenir le helpdesk dès qu’on constate un problème technique ou une fuite.»
L'utilisation rationnelle de l'énergie en 3 questions
Éric Renière, Directeur Technique du groupement Osiris, et Laurence Caussin,
gestionnaire Énergie nous en disent plus sur la manière dont les enjeux
environnementaux rejoignent les intérêts financiers de l’hôpital quand il est
question de consommation d’énergie.
- Quel a été l'élément déclencheur de la réflexion sur la consommation d'énergie du campus Osiris ?
Éric Renière: «Au début des années 2000, nous
avons entrepris de gros projets de rénovation de l’hôpital.
Cinq nouveaux bâtiments allaient être construits.
Quand les deux premiers ont été opérationnels, nous
nous sommes rendu compte que notre consommation
d’énergie avait explosé. Nous avons alors demandé un audit à Bruxelles-Environnement afin d’adapter les
plans de construction des trois bâtiments restants.
Nos efforts ont surtout porté sur l’isolation des bâtiments,
les systèmes de récupération d’énergie sur
la ventilation et la régulation des techniques. Ces
adaptations nous ont permis de limiter sensiblement
les coûts liés à l’énergie. L’impact positif sur l’environnement était par ailleurs bien réel, ce qui nous réjouissait car c’est un aspect qui nous tient à coeur.
L’opération était véritablement "win-win".»
![Laurence Caussin](../../images/news/20161201-ecofriend-3.jpg)
- Vous ne vous êtes pas arrêtés en si bon chemin : quelles sont les initiatives qui ont été prises dans la foulée ?
Laurence Caussin: «Grâce au projet "Plage" proposé par Bruxelles-Environnement, nous avons obtenu un
soutien financier pour installer une comptabilité énergétique
sur nos différents sites hospitaliers. Ce système
nous a aidés à suivre l’évolution de nos consommations énergétiques et à cibler nos actions. Nous avons
notamment remis à neuf et isolé une grande partie des
toitures du site Horta avec l’aide de subsides.
Les travaux de rénovation et de construction sont
nombreux dans un hôpital. Nous veillons à ce que des
choix économes en énergie soient opérés dès le départ,
ce qui est plus efficace. Nous travaillons également sur la
gestion des installations existantes. Notre objectif est de
les optimaliser pour qu’elles fonctionnent de la manière
la plus efficace possible. Nous avons par exemple mis en
place un programme-horaire pour couper l’activité de
certains postes comme la ventilation pendant la nuit. Par ailleurs, nous nous sommes mis à acheter
l’énergie de manière groupée, avec les autres hôpitaux
du réseau iris, ce qui nous permet d’obtenir le meilleur prix possible. Enfin, à l'instar d'un nombre croissant d'hôpitaux, nous sommes partie prenante d’une
initiative mise en place pour soutenir la stabilité du réseau électrique et éviter les fameux black-outs. En cas de risque de pénurie d'énergie, nous mettons à disposition nos groupes de secours de Brien afin d’ouvrir l’accès à une partie de nos réserves d’électricité.
C’est un service d’intérêt général que
nous rendons à la communauté et cela nous permet de diminuer nos consommations
d’énergie.»
- Quels sont les résultats obtenus par la mise en oeuvre de ces mesures ?
Laurence Caussin: «Les résultats sont très positifs!
La consommation énergétique globale des sites Horta
(HUDERF inclus) et Brien a diminué. Nous avons réduit
notre consommation de chaleur au m2 d’environ 20%.
La consommation d’électricité, elle, est en légère augmentation
(10%), mais c’est surtout dû à l’acquisition de
nouvelles machines et à l’augmentation d’activités hospitalières consommatrices d’énergies sur les différents
sites, des domaines dans lesquels nous avons peu de
prise en tant que gestionnaires énergie.»
Éric Renière: «Au final, nous avons été en mesure
de maîtriser nos consommations. Et quand on sait que
le budget total consacré à l’énergie avoisine les 4 millions
d’euros pour un établissement comme le nôtre,
on s’aperçoit aisément que même quelques pourcents
d’économies peuvent déjà faire une grande différence!»
Auteur : Aude Dion
Source : Osiris News
(n°
45, décembre 2016-février 2017)