>>Pratique avancée en science infirmière (PASI) au CHU Brugmann

Initié par la ministre Maggie De Block, le cadre légal pour l'infirmier de pratique avancée a été approuvé la semaine dernière en Commission santé publique de la Chambre. Le projet de loi vise à officialiser cette nouvelle catégorie de praticiens hautement spécialisés.

Qu'est-ce qu'un infirmier de pratique avancée ?

L'infirmier de pratique avancée maîtrise les soins de façon extrêmement étendue. Il est prestataire de soins mais effectue également de la recherche, dirige des infirmiers et des prestataires de soins, coordonne, coache et accompagne. Il peut aussi prendre en charge des traitements médicaux, tels que le suivi de traitements en cours et la prescription d'examens et de médicaments.

L'infirmier de pratique avancée continue à exercer l'art infirmier comme les autres infirmiers mais se verra donc, en plus, autorisé à avoir d'autres activités dans le cadre de soins infirmiers complexes, notamment des activités réservées jusqu'à présent aux médecins, dans le but maintenir, d'améliorer et de rétablir l'état de santé d'un patient.

Une recherche menée au Urgences du CHU Brugmann

Ambre Elis et Yves Maule

Au CHU Brugmann, où on dénombre actuellement deux infirmiers de pratique avancée (PASI), une étude pré-expérimentale a été menée aux Urgences en 2018. Le retour d'expériencePDF a été présenté lors de la dernière journée de formation du département de Médecine critique.

Abstract

Quel est l'impact d'une évaluation holistique précoce du patient aux urgences qui présente une plainte de niveau 3 à 5 selon l'échelle de Manchester, par un infirmier exerçant dans le cadre de pratiques avancées un rôle de case manager, en termes de qualité, délai et durée de prise en charge ?
Y. Maule RN,CCN,MSP (CHU Brugmann, Dép. de Médecine critique)
M. Erpicum RN,CCN,MSP,PhD (Université de Liège)
O.Vermylen MD (CHU Brugmann, Dép. de Médecine Critique)

Un des challenges important auquel la santé publique est confrontée est l'augmentation permanente de fréquentation des services d'urgences (SU) qui mène ces derniers à un engorgement chronique ayant un impact significatif sur la qualité et le coût des soins prodigués dans ces services (KCE n°263 (2016) / OCDE (2015)).

Différentes initiatives ont été prises avec pour objectif de contrôler cette hausse d'activité sans actuellement de résultats probants (triage, redesing des SU, envoi vers la médecine de première ligne).
Ces initiatives ont cependant un impact sur la cohérence de la prise en charge aux urgences (Van der Linden et al. (2016) / Sharieff GQ et al. (2013)) par fragmentation de celle-ci.
Cette hausse d'activité existe aussi dans d'autres pays européens et une adaptation efficace constatée est l'émergence au sein des services d'urgences de la pratique avancée infirmière (IPA) grâce à la création de nouvelles fonctions confiées à des infirmier(e)s ayant suivi un cursus spécifique.
Selon le Conseil International des Infirmières (CII), (2008) : une infirmière de pratique avancée (IPA ; pendant francophone des ANP) « est une infirmière diplômée d'État ou certifiée qui a acquis les connaissances théoriques, le savoir-faire nécessaire aux prises de décisions complexes, de même que les compétences cliniques indispensables à la pratique avancée de son métier, pratique avancée dont les caractéristiques sont déterminées par le contexte dans lequel l'infirmière sera autorisée à exercer. Un master est recommandé comme diplôme d'entrée »

Selon Considine J & al. (2012), McConnel et al. (2013), la pratique infirmière avancée est un concept variable et en Belgique il faut constater que la législation n'est pas adaptée à l'ensemble des pratiques avancées mais bien au Case Management tel que décrit par S. Howenstein & al. (2012).
Notre hypothèse de départ est que l'implémentation au sein d'un SU d'une fonction de Case Management est une piste pour résoudre la surcharge fonctionnelle.

L'objectif de cette recherche pré-expérimentale mono-centrique est d'évaluer l'impact de la mise en œuvre d'une fonction de pratique avancée infirmière représentée par le case management au sein d'un service d'urgences.
Les résultats de cette recherche ayant comme cadre conceptuel le Synergy Model for Patient Care de l'American Association of Critical Care Nurses (Hardin,S & Kaplow,R (2016)) démontrent qu'il existe en fonction des caractéristiques des patients un impact positif statistiquement significatif  sur les temps de premier contact avec les médecins, le temps de séjour aux urgences, les délais d'hospitalisation et sur le taux de patient référé vers un service externe et ce pour certaines catégories de patients, notamment les plus fragilisés. Cette recherche a aussi mis en lumière que les compétences mise en œuvre par l'infirmier Case Manager différent fortement de celle utilisées au quotidien dans un SU. Ces compétences font appel à des « Soft-skill » pour la fonction de Case Manager plutôt que des compétences techniques.

Le 12 novembre 2018, le conseil des ministres a remis un avis favorable au développement de la pratique infirmière avancée en Belgique. Un Arrêté Royal reprenant les travaux du Conseil Fédéral de l'Art Infirmier et de la Commission Technique de l'Art Infirmier est actuellement au Conseil d'Etat pour avis.