>>Hôpital Militaire : s'adosser, et non fusionner

Médecin Colonel Geert Laire, directeur de l'Hôpital Militaire Reine AstridA partir de ce mois de janvier 2007, le CHUB s'adosse à l'Hôpital Militaire Reine Astrid de Neder-Over-Heembeek pour y faire migrer des lits.
Une collaboration, et non une fusion, qui revient en fait à l'ouverture d'un nouveau site pour le CHU Brugmann : le site Reine Astrid. Rencontre avec le Médecin Colonel Geert Laire, directeur de l'Hôpital Militaire.

Quel est le rôle de l'Hôpital Militaire aujourd'hui ?

Le rôle de l’Hôpital Militaire peut se résumer aux trois missions de l’unité: En premier lieu, il contribue à l’appui aux opérations militaires sur le terrain par la mise à disposition de personnel et de matériel médical spécialisés.
Des troupes envoyées n’importe où dans le monde par la Belgique peuvent donc être accompagnées d’une structure médicale qui comporte des médecins et des infirmiers issus de l’Hôpital. La deuxième mission a trait aux aptitudes médicales du personnel: elles sont évaluées régulièrement depuis la sélection médicale de base des candidats au recrutement jusqu’au moment de leur pension.
Enfin, avec toutes les capacités en personnel et en matériel qui ne sont pas engagées pour les deux premières missions, fournir une aideà la Nation. C’est la volonté de la Défense de mettre les moyens médico-militaires au profit de toute la population belge et d’affirmer ainsi le lien entre la Nation et notre département. On peut citer, par exemple, le centre des brûlés et le caisson d’oxygénothérapie hyperbare, qui travaillent principalement au bénéfice de la population civile.

Le monde, et particulièrement le monde des militaires, a énormément changé. Comment les missions de l'Hôpital Militaire ont-elles évolué ?

La mission a fort évolué dans le temps, sur deux volets: celui de la médecine civile, qui est, depuis le début, pratiquée à l'Hôpital Militaire, et celui de la médecine spécifiquement militaire. Dans le domaine de la médecine civile, la fin du service militaire obligatoire a fait très fortement diminuer notre patientèle.
Elle n'atteint plus aujourd'hui la "masse critique" qui permet à un Hôpital d'offrir toutes les spécialités. Par exemple, nous n'avons plus de service d'hospitalisation en médecine interne.
Du côté de la médecine militaire, le défi est celui de la spécialisation croissante du personnel, qu'il soit médecin ou infirmier. Elle est sans doute bénéfique pour un grand hôpital de ville, mais pose des problèmes sur le terrain.
L'infirmier dans l'hôpital de campagne, par exemple, doit pouvoir assister un jour le chirurgien orthopédiste, le lendemain le chirurgien digestif, et le troisième jour assister une opération faite sous anesthésie loco-régionale…
Ces deux évolutions expliquent la décision de l'Hôpital Militaire de s'orienter vers un partenariat. Le CHU Brugmann a été choisi parce que c'est un hôpital public, bicommunautaire (ce qui est important pour la Défense, institution nationale), géographiquement proche de Neder-over-Heembeek et universitaire.
L'Hôpital Militaire souhaite en effet un partenaire de qualité pour continuer à développer ses pôles d'excellence.

Le plus connu de ces pôles d'excellence est le Centre des brûlés. Restera-t-il le même ?

Permettre au Centre des brûlés de rester un centre d'excellence, et de devenir une référence au niveau européen, est l'un des buts du partenariat avec le CHU Brugmann. La collaboration vise l’amélioration de l’encadrement médical du centre. Le Centre des brûlés gardera son autonomie, mais si nous avons besoin d'un avis de la part d'un spécialiste, nous aurons la possibilité de faire appel à un médecin de Brugmann. Il y aura alors une collaboration au chevet du patient.
Il y a également des accords relatifs au choix du site d’hospitalisation le mieux adapté.

L'Hôpital Militaire: un partenaire pour l'avenir...Comment sera organisée la coopération concernant l'unité de revalidation, anciennement située sur le site Magritte, qui sera transférée sur le site Reine Astrid ?

Un peu en miroir de ce qui se passera pour le Centre des brûlés. Les lits transférés depuis le site Magritte seront gérés par le CHU Brugmann. Si des patients de Brugmann ont besoin de l'infrastructure qui est connue et utilisée par des médecins de l'Hôpital Militaire, ce sont les médecins militaires qui superviseront leur utilisation, parce qu'ils connaissent le matériel. Les gardes seront organisées dans le cadre d'une collaboration entre les deux hôpitaux. De toute façon, nous recherchons la souplesse de fonctionnement; le maître mot des négociations est la recherche de l'intérêt mutuel et la bonne volonté. La Défense voudrait utiliser au maximum l’infrastructure hospitalière existante pour des activités hospitalières et souhaite créer avec des partenaires un centre de référence dans le domaine de la revalidation.

Le dialogue entre une entité publique et une entité militaire n'est-il pas plus difficile qu'entre deux organisations qui appartiendraient à la même logique institutionnelle ?

Je ne crois pas… Il faut savoir que l'Hôpital Militaire est déjà, par définition, une institution très proche du monde civil, et qui lui est très ouverte. Rapprocher son fonctionnement, et ses standards de soins, de ceux des hôpitaux civils est d'ailleurs depuis longtemps un de nos buts: la différence entre hôpitaux civils et militaires réside dans la spécificité des missions, pas dans la qualité des soins.

D'autres accords avec des hôpitaux de Bruxelles sont-ils envisagés ?

Oui, dans un délai aussi bref que possible. Des négociations sont en cours avec le Centre de Traumatologie et de Réadaptation, dans le but d'évoluer vers un centre de référence en revalidation.
Nous avons aussi eu des contacts avec le SPF Santé Publique et avec le CHU Saint-Pierre à propos de la prise en charge des maladies infectieuses ou hautement infectieuses, domaine dans lequel l'expertise de Saint-Pierre est reconnue par tous, mais qui concerne aussi la médecine militaire. Ce dossier devrait s'étoffer dans les mois à venir. Le but est avant tout que l'Hôpital Militaire trouve sa place aux côtés des autres entités de la région de Bruxelles, avec un mandat clair.
Tout doucement, dans les négociations en cours, nous délimitons les tâches des différents acteurs, pour arriver à des relations harmonieuses entre tous.

:: SMUR : des changements aussi :: L'Hôpital Militaire comporte un service médical d'urgence qui sera lui aussi transformé. Il connaissait en effet une situation paradoxale: d'un côté, peu de sorties régulières parce que le SMUR est implanté dans un quartier peu peuplé, et de l'autre une sollicitation fréquente liée à une convention passée avec les pompiers de Bruxelles, qui impose une sortie en doublon lorsque l'accident ou l'incendie signalé risque de provoquer des brûlres chez plusieurs victimes, ou des brûlures graves chez une seule victime. Cette convention était petit à petit devenue la source de beaucoup de sorties peu utiles. Le SMUR militaire a en outre des tâches très spécifiques – appui aux visites protocolaire, rapatriement de soldats blessés sur le terrain. Pour assurer la rentabilité tout en gardant les spécificités, plusieurs modifications ont été décidées:
>une optimalisation des procédures convenues avec les pompiers;
>un engagement du SMUR militaire dans les transferts secondaires médicalisés, entre les différents sites du CHU Brugmann et donc aussi vers et depuis l'Hôpital Militaire;
>une standardisation des procédures pour un travail harmonieux avec les autres SMUR de la région bruxelloise.

Auteur : Marion Garteiser
Source : Osiris News (n° 7, décembre 2006-février 2007)

>>De Magritte à Reine Astrid.